Les psaumes sont écrits sur les magnétophones Les chorus ont un nègre à chaque mélopée Les bouches font des langues sept fois retournées Miserere Seigneur du fond des microphones
La nature d’acier pousse des fleurs chromées Le juste en Cadillac s’encense du cigare Le courrier meurt de peur dans les aérogares Miserere Seigneur du fond des destinées
Le boulanger joue la tournée au pain azyme Les moutons des prisons se laissent tricoter Et le coq de Saint Pierre a tranché son gosier Miserere Seigneur du fond des anonymes
Les condamnés jouent au poker leur appétit Et laissent aux suivants leur part de Jamaïque Le coup de grâce dans le vent est liturgique Miserere Seigneur du fond des piloris
L’estomac du commun se met en diagonal Le traiteur donne aux chiens sa pitié tarifée Les boueux ont glissé sur des peaux d’orchidées Miserere Seigneur du fond des capitales
Les banques de l’amour sont pleines à craquer Les “je t’aime” publics assomment les affiches Les adolescents ont des lèvres postiches Miserere Seigneur du fond des oreillers
Les vitrines regardent passer les voyelles Les ortolans dans le commun prennent le frais Et le saumon fumé boude le tapioca Miserere Seigneur du fond de nos gamelles
Les femmes en gésine inondent le pavé Les mineurs font un blanc à chaque lavabo Les souffleurs de Baccara font des bancos Miserere Seigneur du fond des encavés
Les brebis de Panurge attendent au vestiaire Les visas escomptés percutent sur l’azur La queue chez l’épicier jouit contre le mur Miserere Seigneur du fond des muselières
La ville a dégrafé son corsage de mort Les balles dans la rue ont la poudre nomade Les pavés font la main aux yeux des barricades Miserere Seigneur du fond des thermidors
Les temples sont cernés et sentent le roussi Les magasines font la pige aux évangiles Et les chemins de croix se font en crocodile Miserere Seigneur du fond des crucifix
Le journal titre en deuil la putain des frontières La fleur fane au fusil et meure sous un drapeau Et les téléscripteurs nous mènent en bateau Miserere Seigneur du fond de nos galères
La maladie veille au chevet des ganglions Le coeur est métronome et la vie est musique A l’hôpital les symphonies sont catholiques Miserere Seigneur du fond des pulsations
La fonderie sur le tour égrène son rosaire Le tueur de la rue a gagé son beefsteak Et celui de Kobe n’aura pas un kopeck Miserere Seigneur du fond des mercenaires
Le verbe s’est fait chaire dans le ventre rusé La putain Marguerite a la peau qui dépasse Le caillot dans les plis sinueux se prélasse Miserere Seigneur du fond des pubertés
Les bourgeois de la rue ont piqué la vérole Et réclament partout de faux médicaments Qu’on leur sert en faisant claquer toutes leurs dents Miserere Seigneur du fond des carmagnoles
Les sextants sont en grève au coeur des matelots Les oiseaux carburés fientent les équipages Le soleil fait la course avec le paysage Miserere Seigneur du fond des paquebots
La trouille a revêtu la terre de sa housse Le plat de contrition se vend au marché noir Le curé fait du supplément sous l’ostensoir Miserere Seigneur du fond de la ressource
Les condamnés jouent au poker leur appétit Ils vous laissent Seigneur leur part de solitude Le service est compris nous avons l’habitude Descendez donc seigneur de notre connerie |